Au cours des derniers mois, nous avons mis sur pieds notre communauté virtuelle (OC Connect), et cela m’a permis d’affirmer à nouveau certaines choses :

  • Les préjugés et la stigmatisation que les personnes vivant avec l’obésité doivent faire face est perceptible et brise le cœur.
  • La maladie de l’obésité est très complexe. Il n’y a pas qu’une seule cause ni qu’un seul remède. C’est une expérience unique pour chacun de nous.
  • Plusieurs d’entre nous avons vécu des années avec de mauvaises informations, disant que c’est nous le problème, et que notre maladie est uniquement le résultat de nos mauvais choix.
  • La société renforce plusieurs de ces mauvaises informations, ce qui a pour résultat de continuer à être une chasse ouverte pour propager les blâmes, les jugements, et la haine envers des personnes vivant dans des corps plus larges.

En rencontrant des collègues militants du monde entier, et avec les membres de notre communauté d’OC, c’est évident que la douleur, la honte et la colère sont des thèmes universels entourant l’obésité. Bien que nous provenions tous de nos propres routes et que nous ayons vécu des expériences uniques ; nous partageons des blessures communes. Nous avons été traités en « moins que », et ce, pendant tellement longtemps et dans tellement de situations que cela a eu pour effet, pour plusieurs d’entre nous, de porter en soi énormément de colères.

La colère peut être préjudiciable, mais elle peut aussi être une puissante force de changement. La colère peut aussi s’avérer être une nouvelle émotion à gérer pour plusieurs d’entre nous. L’une des plus grandes leçons que j’ai apprises du programme de chirurgie bariatrique auquel j’ai participé a été d’apprendre les droits d’affirmation. Même si les concepts eux-mêmes n’étaient pas nouveaux ou ni même révolutionnaires, mais le fait de les considérer comme étant applicables à moi et à ma façon de conduire la vie a créé un véritable changement de cap.

Je me suis rendu compte que j’avais passé 40 ans de ma vie à essayer de plaire aux autres, afin de compenser mon apparence. J’ai également réalisé que cela ne m’aidait pas vraiment ni n’aidait les autres comme moi. J’étais silencieusement complice de traitements inappropriés dont il fallait dénoncer l’existence.

Comprendre la colère et la manière de la canaliser était nouveau pour moi. J’ai trouvé cette incroyable œuvre d’art d’une artiste canadienne dénommée Cynthia Frenette, qui depuis est devenue mon image de bureau d’ordinateur. Elle représente un féroce guépard rose portant ses crocs, avec de gros et audacieux mots : « J’ai le droit d’être en colère ». C’est mon rappel quotidien que j’ai le droit d’être en colère. Et, dans la même mesure, de rechercher les occasions d’utiliser cette colère afin d’alimenter le changement.

Vivre avec l’obésité est difficile, et il y a énormément de souffrance et de colère dans notre communauté — et c’est pour ça que nous sommes là. Nous vous voyons. Nous vous entendons. Nous devons puiser dans notre colère collective afin de créer un changement systémique.

Nous savons que vous en avez assez de vous sentir obligé.e de justifier la place que vous occupez dans la vie, et ce, à tous les niveaux.

Nous savons que vous êtes en colère du fait que les personnes ayant un corps plus volumineux continuent d’être une cible facile de blagues même pas drôles, et qui diminuent notre dignité en tant que personnes.

Nous savons que vous êtes furieux et furieuses que les gens n’acceptent pas les faits fondés sur les preuves concernant la maladie avec laquelle nous vivons ; et qu’ils perpétuent la croyance selon laquelle nous ne sommes que des paresseux et trop idiots pour comprendre la perte de poids.

Nous savons que vous êtes furieux et furieuses, tout comme nous, du fait que nous les personnes vivant avec l’obésité, nous nous heurtions davantage aux préjugés reliés aux soins au sein même du système médical, soit à l’endroit où nous devons nous rendre pour obtenir de l’aide.

Nous savons aussi que même quelques-uns de nos meilleurs allié.e.s sur cette terre continuent à ne pas comprendre notre colère. En soi, cette situation peut être exaspérante. Il arrive que même mes amis les plus proches aient des difficultés à comprendre que ce qui se passe est fondamentalement inacceptable, parce qu’ils ont, eux aussi, intégré de mauvaises informations. Souvent, ils peuvent être de notre côté, mais sans partager entièrement la colère, souhaitant que nous tirions le meilleur parti de ce que nous pouvons. Mais cela n’est pas suffisant. Et c’est ce qui rend notre communauté si importante. Nous, en tant que personnes vivant avec l’obésité, nous devons exiger mieux et canaliser collectivement notre énergie et notre colère.

Votre colère est une mesure d’amour. Elle jaillit quand vous voyez l’humanité et la dignité de quelqu’un que vous aimez et voulez le défendre. La colère s’enflamme aussitôt que vous détectez qu’il se passe quelque chose autour de vous —, et ce, même si c’est banal — c’est injuste et ça doit changer. La colère est la combustion qui fait partir le moteur.

Il y a des millions d’autres conversations à avoir autour de l’obésité, de la colère et du changement, mais pour aujourd’hui, je vous remets cet appel aux armes. Rejoignez-nous. Rejoignez-nous pour reconnaître l’obésité en tant que maladie. Rejoignez-nous pour comprendre comment vivre avec cette maladie. Rejoignez-nous pour faire connaître l’obésité aux autres.

Rejoignez-nous pour exiger une amélioration de la part du système médical. Rejoignez-nous pour aider les gens à adopter de nouvelles façons de penser. Rejoignez-nous afin de faire plus de bruit, de la manière dont vous pouvez, d’où vous êtes.

Rejoignez-nous afin de faire de notre colère l’un de nos super-pouvoirs.

Lisa Schaffer,

Présidente, du Comité d’engagement public d’OC